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Quelles ruptures dans les pratiques de mobilité au travers des premiers enseignements de la Grande Enquête Mobilité 2022 ? 

Ces dernières années se caractérisent par d’importants bouleversements dans la sphère des mobilités (émergence de la mobilité électrique, déploiement des vélos en libre-service, intensification des livraisons, hausse des prix des carburants…) et plus largement dans la société (crise sanitaire du COVID 19, accélération de la crise climatique, période de forte inflation…). Par une enquête conduite à l’automne 2022, les connaissances en termes de demandes de mobilité des habitants de l’aire d’attraction clermontoise ont été mises à jour.

En termes de comportements de mobilité, alors que la tendance observée localement depuis le début des années 1990 portait sur une croissance continue de la mobilité des personnes, associée à un plus grand usage de la voiture, il est fait le constat qu’au cours de la dernière décennie, on assiste à deux ruptures majeures : la baisse du nombre de déplacements (env. 15 % de déplacements en moins) et le moindre recours à la voiture (- 5 points de parts modales pour la voiture). Ces évolutions ne sont pas propres au territoire clermontois puisque toutes les grandes agglomérations françaises et leurs zones d’attraction connaissent ce phénomène depuis le milieu des années 2010.


La Grande Enquête Mobilité 2022 : périmètre, objet, nombre de personnes enquêtées

La Grande Enquête Mobilité 2022 a fait l’objet d’un projet collectif fédérant 11 EPCI, afin de connaître les pratiques de mobilité de près de 600 000 habitants répartis dans 285 communes. Cette enquête s’appuie sur la méthode définie par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), sous le terme d’Enquête Mobilité Certifiée Cerema (EMC²).

D’octobre 2022 à janvier 2023, près de 10 000 personnes ont répondu à cette enquête, qui permet de décrire l’ensemble des déplacements réalisés.

Cette enquête mesure les déplacements des personnes qui se définissent ainsi : mouvement d’une personne, effectué pour un certain motif (travail, études, achats…), sur une voie publique entre une origine et une destination à l’aide d’un ou de plusieurs modes de transport. Par exemple, aller de la périphérie thiernoise au cœur de Clermont-Ferrand pour le travail en utilisant la voiture, puis le train, puis la marche, compte pour un seul déplacement (en train, car c’est le mode majeur utilisé pour ce déplacement). Le fait d’aller acheter du pain depuis son domicile, puis de la presse dans un autre commerce et revenir chez soit amène à réaliser au total trois déplacements. A noter que la notion de distance n’intervient pas dans la définition du déplacement.  


La baisse du nombre de déplacements

Alors que les différentes enquêtes réalisées autour de Clermont-Ferrand en 1992, 2003 et 2012 mettaient en évidence une augmentation régulière du nombre de déplacements réalisés par jour et par personne, l’enquête de 2022 se distingue par une baisse de la mobilité des personnes. En effet, à l’échelle du périmètre du Grand Clermont (SCoT) le nombre de déplacements par jour et par personne passe de 4,15 à 3,38. Si l’augmentation des prix des carburants (pour le diesel le prix moyen annuel passe de 1,41 € / litre en 2012 à 1,87 € en 2022) ou le développement du télétravail apparaissent comme des facteurs explicatifs « naturels », les raisons sont plus diverses : vieillissement de la population, développement du e-commerce, nouvelles pratiques de mobilité (moins de déplacements le temps de midi), voir des signes de moindre sociabilité de certaines catégories (la baisse de mobilité des étudiants le jeudi est de l’ordre de –40 %). Ainsi, c’est une combinaison de facteurs, qui amène au constat de moindres mobilités des personnes. De plus, cette baisse n’est pas uniforme territorialement (elle concerne surtout les habitants du Grand Clermont qui se déplaçaient plus que leurs homologues résidants dans des territoires plus éloignés) ni socialement (la baisse concerne surtout les catégories cadre / profession intellectuelle supérieure et profession intermédiaire).

Concernant les kilomètres parcourus, on assiste également à une baisse, même si elle est moins marquée. En effet, alors que le nombre de déplacements décroit de 16 %, celui des kilomètres parcourus par les habitants du Grand Clermont ne recule que de 11 %. Mais, l’enquête révèle aussi que l’éloignement est croissant entre le domicile et le travail passant de 12,6 km à 13,4 km (soit + 6,3 %). Ainsi, il apparait d’une part que les habitants rationnalisent leur programme de mobilité (faire moins de déplacements, aller moins loin chercher un service), et d’autre part qu’ils ne sont pas en capacité à rapprocher lieu d’habitat et lieu de travail. Il existe deux évolutions territoriales à l’œuvre : une concentration de l’emploi dans certaines communes et en premier lieu dans la Métropole clermontoise / une diffusion de la périurbanisation dans un arc allant de Combronde à Billom.

La baisse de l’usage de la voiture

La deuxième rupture concerne l’usage de la voiture. Si au fil des enquêtes de 1992 à 2012, la part modale de la voiture était stable (environ 63 %), l’enquête de 2022 met en évidence un recul de l’usage de la voiture qui ne pèse « plus que » 60% des déplacements… mais 80 % des kilomètres parcourus et 90 % des émissions de CO².

Ainsi la voiture reste au centre des mobilités des habitants de l’aire d’influence de Clermont-Ferrand, notamment pour aller travailler, accompagner (les enfants) ou faire des courses. De plus, le nombre de voitures en circulation tend à croitre du fait de l’augmentation de la population même si l’équipement moyen par ménage est en léger recul. Les motorisations non thermiques se développent mais restent marginales : seuls 5 % des véhicules ne sont pas essence ou diesel et la motorisation électrique, la plus vertueuse sur le plan environnemental, ne concerne au final qu’une voiture sur cent. Par ailleurs, aucune augmentation de l’occupation moyenne des voitures n’est observée, avec toujours aux environs de1,35 personnes par voiture pour l’ensemble des motifs et de 1,03 personnes pour les déplacements domicile-travail. Ainsi, les précédentes tentatives d’augmentation de l’occupation des voitures via des politiques publiques n’ont pas produits d’effets pérennes dans le temps.

Mais cette baisse de l’usage de la voiture (- 225 000 déplacements ; part modale passant de 64 à 59 % à périmètre comparable) constitue un signal pour aller vers une nouvelle approche des mobilités, avec une plus grande appétence pour les modes actifs (marche et vélo), alors que l’usage des transports collectifs stagne. La marche a gagné trois points passant de 26 à 29 % des déplacements et le vélo voit sa part doubler passant de 1 à 2 % des déplacements. Toutefois, ces modes restent utilisés principalement pour parcourir des petites distances (en moyenne pas plus d’un kilomètre pour la marche, trois pour le vélo). Dès lors, ils n’assurent qu’une faible part des kilomètres parcourus quotidiennement par les habitants de l’aire d’influence clermontoise. Le regain du vélo s’observe principalement pour les habitants de la métropole clermontoise. Il s’explique par un plus grand maillage en aménagement cyclable, la mise à disposition de vélos en libre-service et la démocratisation du vélo à assistance électrique.

Ainsi, il ressort plutôt une rationalisation des déplacements en voiture : Les déplacements les plus courts, comme par exemple se rendre à l’école ou faire des achats de proximité, sont plus souvent réalisés à pied ou à vélo que par le passé, mais l’usage de la voiture reste central dès que la distance à parcourir dépasse les deux kilomètres.

L’évolution du processus de métropolisation

Du fait d’un grand nombre d’habitants, d’emplois et de services au sein de Clermont Auvergne Métropole, ce territoire concentre une grande partie de la mobilité locale. En effet, près de 900 000 déplacements recensés dans la Grande Enquête Mobilité 2022 se réalisent en son sein. Les déplacements réalisés dans le reste des 10 autres EPCI ou en lien entre les EPCI périphériques et Clermont Auvergne Métropole représentent environ 780 000 déplacements.

L’analyse des déplacements dans le temps, entre les enquêtes de 2012 et de 2022, permet de cerner les évolutions dans la géographie des flux de mobilité. Cette analyse a été réalisée à périmètre constant (le Grand Clermont – soit les EPCI de Clermont Auvergne Métropole, Riom Limagne et Volcans, Mond’Arverne, Billom communauté).

Pour les habitants du Grand Clermont, il ressort que :

  • Les déplacements internes à chaque EPCI génèrent les plus gros volumes de déplacements. Néanmoins, ceux-ci sont moins nombreux en 2022 qu’en 2012 et plus particulièrement au sein de Clermont Auvergne Métropole. En effet, près de 173 000 déplacements quotidiens s’effectuent en moins au sein de ce territoire (-16 %). La baisse de mobilité dans la métropole représente environ deux-tiers de la baisse de la mobilité de l’ensemble du Grand Clermont (1 589 265 déplacements en 2012 à 1 338 065 déplacements en 2022).
  • Les déplacements d’échanges entre Clermont Auvergne Métropole et les EPCI de Riom Limagne et Volcans / Mond’Arverne / Billom communauté représentent des volumes bien moindres en nombre, mais génèrent des distances importantes. Pour cette catégorie de déplacements il est plutôt observé une stabilité en nombre et en distance. A noter que les échanges entre Mond’Arverne et Billom communauté sont peu nombreux. Ces deux territoires échangent très peu avec Riom Limagne et Volcans.
  • Les déplacements avec les territoires extérieurs du Grand Clermont sont modestes. De plus, les chiffres présentés ne prennent pas en compte les déplacements réalisés par les habitants vivant aux portes du Grand Clermont (Dômes Sancy Artense, Entre Dore et Allier, Agglomération Pays d’Issoire…) et qui se déplacent en direction du Grand Clermont. Les chiffres montrent seulement que les habitants du Grand Clermont sont moins tournés vers ces territoires extérieurs en 2022 qu’en 2012.

Au final, le phénomène marquant est la réduction de déplacements de proximité au sein de son EPCI de résidence, expliquant que la baisse de la mobilité est plus forte en volume de déplacements (-16 % à l’échelle du Grand Clermont) qu’en kilomètres (-11 %).

RENCONTRE – Adaptation au changement climatique dans le Massif central : du plan à son déploiement dans les territoires

Une rencontre de l’Agence d’Urbanisme Clermont Massif central (AUCM), avec le Commissariat du Massif central et Clermont Auvergne Métropole.

Pour relever les enjeux territoriaux du changement global, les acteurs du Massif central s’engagent. Après les temps d’élaboration et d’adoption d’un Plan Stratégique d’Adaptation au Changement Climatique (PSACC), vient celui de la mise en oeuvre : quelles priorités, quelles actions, quelles ingénieries locales et nationales, quelles ressources pour que la vision commune se fasse projets concrets d’adaptation dans les territoires et filières du Massif central ?

CONSULTER LE PROGRAMME COMPLET

PROGRAMME :

9H00 – ACCUEIL CAFÉ

9H30 – OUVERTURE
L’adaptation au changement climatique, un enjeu majeur pour le Massif central

9H50 – LE PLAN STRATÉGIQUE D’ADAPTATION AU CHANGEMENT CLIMATIQUE DU MASSIF CENTRAL
Un dispositif de réflexion et d’action, raconté par ses acteurs

11H20 – L’ADAPTATION DU MASSIF, C’EST MAINTENANT
3 initiatives locales d’adaptation déjà à l’œuvre

12H10 – DÉJEUNER / EXPOSITION DES TRAVAUX DE NICOLAS TAILLANDIER ET ELZA LACOTTE
Buffet offert par le Commissariat du Massif central -à la Maison de la Culture (Salle Chavignier)

14H00 – S’ADAPTER, LA DIVERSITÉ DES BESOINS EN INGÉNIERIE
Restitution et mise en débat d’une enquête menée par l’AUCM dans le Massif central

14H45 – S’ADAPTER, VU PAR LES ACTEURS DE L’INGÉNIERIE PUBLIQUE
La complémentarité des offres d’accompagnement locales et nationales

16H15 – S’ADAPTER, LE DÉPLOIEMENT DU PSACC
Les actions soutenues par le commissariat du Massif central

 

Club Industrie du Futur Clermont Vichy Auvergne : une dynamique territoriale en faveur des projets industriels 

Le Pôle métropolitain Clermont Vichy Auvergne a fait de l’industrie du futur un défi prioritaire à relever. La sensibilité des collectivités qui y adhèrent, dont toutes, à l’exception de Billom Communauté, ont été labellisées Territoire d’Industrie dans le Temps 2 du programme (2023-2027) n’y est sans doute pas étrangère. Mais au-delà, le souci d’assurer la résilience, le renforcement et la soutenabilité du tissu productif local entre évidemment aussi en ligne de compte. Celui-ci ne saurait ignorer la « déclinaison de la révolution numérique au champ industriel[1] » par la digitalisation et la numérisation des activités. 

Certains sujets des plans d’actions, comme le foncier économique stratégique, les actions de formation ou encore l’accompagnement des entreprises industrielles aux transitions, dépassent le périmètre des territoires d’industrie. Il est apparu nécessaire, en complément de l’accompagnement à l’échelle nationale, de structurer la démarche localement en considérant les spécificités du Pôle métropolitain. Le club local Industrie du Futur Clermont Vichy Auvergne vient jouer ce rôle de scène d’échanges et de mise en synergie dans le cadre d’une animation de réseau territoriale, s’adressant tant aux élus qu’aux techniciens.  

Le club Industrie du Futur Clermont Vichy Auvergne a ainsi abordé, depuis son lancement en 2024, la façon de remédier localement et collectivement, aux principaux obstacles à la réindustrialisation. Il a questionné les défis relatifs au foncier économique, à la formation et aux ressources humaines, puis à l’énergie.  

1 / Foncier à vocation productive : sortir de la concurrence pour Enrichir l’écosystème industriel

Produire autrement demande de mener une politique industrielle cohérente et solidaire, tant dans le parcours des entreprises que dans la mobilisation des ressources. L’un des engagements du Pôle métropolitain en faveur des transitions industrielles vise à anticiper l’accueil et le développement des projets industriels, tout en prenant soin de s’inscrire dans une dynamique de sobriété foncière. 

  • Concilier besoins des entreprises et contraintes d’aménagement 

Le Pôle métropolitain dispose de plusieurs atouts majeurs comme la centralité de son positionnement géographique, sa population estudiantine ou encore la diversité de son tissu industriel. Mais les besoins des projets industriels, avoisinant a minima 10 ha, entrent en tension avec la disponibilité foncière réelle. La sélection des projets devient alors plus exigeante, au risque d’exclure des activités essentielles pour le fonctionnement économique du territoire mais jugées non stratégiques dans les politiques d’accueil. Attirer des projets industriels ne se résume plus à proposer du terrain ; encore faut-il être capable de proposer des sites « prêts à l’emploi » pour les porteurs de projets. 

  • Allier réindustrialisation et urbanité 

L’ancienne friche militaire de Montpertuis-Palazol à Bellerive sur Allier, labélisée « site clé en main 2030 », incarne une nouvelle manière de penser l’industrialisation. Tout en affirmant une ambition industrielle, elle s’inscrit à la fois dans une dynamique de recyclage foncier, de respect environnemental et d’intégration paysagère. Ses 125 ha d’un seul tenant permettent de proposer des tènements fonciers de grandes dimensions, susceptibles d’accueillir des projets exogènes. Ce futur campus industriel à haute qualité environnementale s’articulerait autour d’une locomotive industrielle, d’une polarité de services et d’un espace dédié à l’innovation, la formation et la recherche. Par la volonté de conserver la maîtrise foncière, la mémoire du lieu et l’armature infrastructurelle et paysagère existante, le projet rompt avec le modèle d’aménagement classique des zones d’activités périphériques. 

  • Garantir le parcours résidentiel des entreprises 

L’exemple des laboratoires OST Développement illustre l’importance de penser le foncier comme un parcours, pas comme une simple implantation. Contrainte de quitter ses locaux, l’entreprise a pu poursuivre son activité au Biopôle Clermont-Limagne grâce à une offre adaptée et au soutien des acteurs publics. Ce transfert a permis à l’entreprise de conserver le savoir-faire de ses salariés et d’augmenter sa capacité de production. Les zones d’activités ne doivent plus être perçues comme des enclaves, mais comme des lieux vivants, connectés, propices à l’émulation et à la coopération. L’intégration dans un écosystème économique et intellectuel dynamique s’avère essentiel pour le développement de l’entreprise. OST Développement bénéficie de synergies précieuses avec le monde académique, l’innovation et d’autres entreprises. 

2 / Ressources humaines : se Réconcilier avec l’industrie

Marginalisée par l’économie de la connaissance et la tertiarisation de l’économie, l’industrie joue pourtant un rôle d’impulsion majeur en termes de formation, de recherche et d’innovation. Il importe encore de consolider son ancrage territorial pour s’affirmer en ce sens. L’Association Française pour le Développement de l’Enseignement Technique (AFDET) appelle à des partenariats simplifiés, lisibles, et ancrés localement pour favoriser la mise en relation avec les structures d’enseignement existantes, souvent difficile à assumer pour les entreprises seules[2]. 

  • Former aux besoins concrets des entreprises 

Le parcours « Industrie 4.0 » du « Master 2 Automatique, Robotique »[3] illustre la capacité à créer des formations sur mesure. Lancée à l’initiative d’un groupe d’industriels soutenus par l’Agglo Pays d’Issoire, cette formation en alternance présente la spécificité d’aborder toutes les matières relatives à l’industrie 4.0 en mêlant informatique, automatique, robotique, programmation ou encore data sciences. Ces profils susceptibles de construire et de piloter une stratégie de transformation digitale de l’outil industriel s’avèrent difficiles à trouver. Avec 97 % de réussite et 90 % d’insertion professionnelle, ce type d’initiative illustre la capacité à répondre aux besoins en compétences du tissu industriel.  

  • Attirer les jeunes vers les métiers industriels

Les difficultés de recrutement dans l’industrie se constatent dès le stade du choix de formation des jeunes. L’enjeu réside alors moins dans l’ouverture de nouveaux cursus que dans la recherche de candidats pour les formations existantes. Faute de visibilité, l’industrie reste une inconnue pour beaucoup de jeunes et leur entourage. Les élèves qui s’y projettent présentent souvent un lien personnel ou familial avec le secteur. Les jeunes attirés par les formations industrielles se distinguent par leur désir de manipuler du matériel, leur attraction pour le concret et la possibilité de concevoir et de réaliser par soi-même. A l’inverse, ceux qui sont orientés par défaut en lycée professionnel n’y restent pas.  

  • Donner à voir l’industrie de l’intérieur 

Changer le regard sur l’industrie passe aussi par des événements immersifs. Afin de sensibiliser les collégiens à l’intérêt et à la diversité des métiers de l’industrie, le Territoire d’Industrie Riom-Vichy a organisé en janvier 2024 le salon des métiers industriels et de l’entreprise (SMILE). Au travers de la reconstitution d’une entreprise, il donne à voir aux collégiens, parents et demandeurs d’emplois toute la diversité des métiers dans l’industrie, les conditions dans lesquels ils s’exercent ainsi que les formations pour y parvenir[4]. Donner à voir les carrières et les passerelles possibles par un échange avec des professionnels en situation constitue un véritable levier pour faire évoluer les représentations. 

  • Accompagner la montée en compétence 

Lorsque les formations ne répondent pas à leurs besoins spécifiques, les entreprises prennent les devants. Le groupe ambertois Omerin, spécialisé dans la conception et la production de fils, câbles et gaines isolantes, a ainsi anticipé les besoins en formation et en recrutement induits par l’ouverture de sa nouvelle usine sur le Parc d’activités intercommunal Entre Dore et Allier. L’entreprise a d’abord ciblé les recrutements stratégiques, notamment celui de la responsable qualité, et positionné un noyau dur d’une vingtaine d’opérateurs exerçant sur le site du siège, qui se déplaceront à terme sur le nouveau site et seront susceptibles de former les futurs collaborateurs. En l’absence d’école de câblerie, cette solution pragmatique a permis à Omerin de développer depuis 4 ans un programme de formations internes s’appuyant sur le transfert d’expérience et la structuration des compétences par des référents techniques spécialistes des métiers.   

3 / Transition énergétique : décarboner l’industrie

Olivier Lluansi [5], ingénieur enseignant à l’École des Mines de Paris, auteur d’un rapport sur la réindustrialisation de la France à l’horizon 2035[6], souligne que l’objectif de réindustrialisation [7], ne saurait être réaliste sans un accès suffisant à l’énergie. Ce constat pose la question de l’accès à une énergie, notamment décarbonée, à un coût compétitif pour l’industrie, mais aussi celle de la réduction des besoins en énergie dans l’industrie afin de remédier à cette difficulté structurelle. Ces perspectives s’inscrivent dans l’objectif européen de neutralité carbone à horizon 2050. 

  • Renforcer et transformer le système électrique 

La région Auvergne Rhône-Alpes, leader de l’électricité décarbonée, doit adapter son réseau à la montée des usages industriels et à la sortie des énergies fossiles. L’enjeu consiste à acheminer l’électricité en continu de la production vers les réseaux distributeurs pour les consommateurs et d’équilibrer en permanence la production et la consommation [8]. Mais doubler la part de l’électricité dans la consommation finale d’ici 2050, tout en réduisant de 40 % la consommation d’énergie globale implique le renforcement du réseau à très haute tension, le raccordement de nouvelles installations bas-carbone, et le renouvellement des infrastructures. Cet objectif de transition énergétique revêt une dimension stratégique tant de réindustrialisation que de souveraineté nationale. 

  • Valoriser les gaz décarbonés 

Face aux besoins élevés de chaleur ou de production de vapeur de certaines industries, le gaz renouvelable se développe et constitue déjà une réalité. Il présente l’avantage de s’appuyer sur un maillage géographique local et de valoriser des infrastructures existantes, appartenant aux collectivités et déjà amorties. Les maillages géographiques sont locaux avec une production de proximité. 70 sites injectent déjà du gaz renouvelable sur le réseau en Auvergne-Rhône-Alpes dont près du tiers en Auvergne. Le gaz renouvelable apporte des débouchés sur la gestion des déchets et effluents comme les eaux usées ou des résidus de coproduits pour les industriels valorisés en énergie par des méthaniseurs sans impliquer de changement de process. Cette solution, en apportant flexibilité, pilotage et capacité de stockage, sécurise l’approvisionnement énergétique et vient ainsi renforcer la cohérence et la complémentarité avec le réseau électrique. 

  • Adopter une vision énergétique de long terme

À Thiers, l’industriel agroalimentaire Brüggen a déployé une stratégie énergétique ambitieuse, mêlant efficacité et production d’énergie. Une feuille de route du fonctionnement de l’entreprise est établie chaque année avec l’identification de points d’amélioration travaillé collectivement au titre desquels figure l’énergie. Plusieurs sujets ont fait l’objet de mesures ciblées comme la centralisation du froid avec récupération de la chaleur, l’isolation des circuits thermiques, la récupération des condensats ou encore la supervision de la consommation par des capteurs. L’entreprise a ainsi réalisé environ 10 % d’économie d’énergie. En parallèle de ces investissements qui s’orientent vers une meilleure utilisation de l’énergie fossile, l’entreprise a fait le choix d’installer une installation photovoltaïque permettant de couvrir 13 % de sa consommation électrique dès 2026. Cette stratégie itérative menée sans subvention illustre la manière dont une meilleure performance énergétique vient appuyer la compétitivité de l’entreprise. 

  • Accompagner les entreprises vers les outils et dispositifs existants

Si les grands comptes se positionnent directement sur des dispositifs d’investissements et d’innovation, les PME et TPE manquent souvent de lisibilité et de moyens pour enclencher seules leur transformation énergétique. La Chambre de Commerce et d’Industrie, dans le cadre d’un conventionnement avec l’ADEME, propose des diagnostics gratuits et sert de porte d’entrée pour les orienter vers les dispositifs adaptés. L’ADEME propose par ailleurs deux dispositifs s’adressant plus particulièrement aux acteurs productifs et industriels, DECARB FLASH 2025-2027 [9] et DECARB IND 25 [10], qui financent des actions concrètes de réduction des émissions. La décarbonation et la réindustrialisation impliquent également des changements de technologie et de nouveaux marchés à adresser. L’ADEME propose dans le cadre du Fonds Vert un dispositif visant à soutenir l’industrie dans les nouvelles activités poussées par la transition : Territoire d’industrie en transition écologique [11]. 

 Conclusion

Dans un contexte de concurrence exacerbée à l’échelle mondiale et de succession de crises économiques, sanitaires, environnementales et énergétiques, maintenir et développer l’attractivité industrielle constitue un enjeu de taille. Le futur territorial de l’industrie nécessite de jouer collectif par une mise en mouvement et en stratégie de tous les acteurs impliqués pour anticiper, s’adapter et rediriger les modèles productifs à l’aune des grandes mutations contemporaines. Le club Industrie du Futur Clermont Vichy Auvergne du Pôle métropolitain permet d’appréhender de façon concertée les défis qui s’imposent à l’industrie. 

Concomitamment à cette dynamique collective, le Manifeste pour une stratégie industrielle territoriale continue de rassembler des signataires pour constituer une communauté d’acteurs engagés susceptibles d’affirmer l’identité industrielle du Pôle métropolitain et de favoriser l’accueil et le déploiement de projets industriels.

Les résultats 2023 de l’enquête sur les loyers du parc privé sont sortis : le marché clermontois reste abordable même si les loyers augmentent sensiblement

Depuis bientôt 10 ans, l’Observatoire Local des Loyers (OLL) de l’agglomération clermontoise, porté par l’Agence d’Urbanisme Clermont Massif central (AUCM), réalise annuellement une enquête auprès des professionnels de l’immobilier et des propriétaires-bailleurs afin de connaître les loyers du parc locatif privé. Ce parc de 57 500 logements représente 28 % des habitants du Grand Clermont : mieux le connaître permet d’appréhender les conditions d’habitat d’une part importante de la population. En plus des résultats complets de l’enquête 2023, l’AUCM propose cette année une comparaison des loyers des parcs locatifs privé et public. Dans quelle mesure ces deux offres locatives permettent de loger les ménages du territoire, notamment les plus modestes ?  

Des loyers encore abordables dans le parc locatif privé, mais qui augmentent fortement sur la ville-centre 

Avec un niveau de loyer médian hors charges de 9,5 €/m² en 2023, le parc locatif privé du Grand Clermont est relativement abordable en comparaison des autres territoires couverts par un OLL : 40ème niveau de loyer le moins élevé observé sur les 56 territoires du réseau. Les niveaux de loyers du territoire sont ainsi proches de ceux d’Arras (9,6 €/m²) et Lorient (9,7 €/m²). 

Pour autant, même si le parc locatif privé clermontois reste parmi les moins chers, il a connu une augmentation de +4,4 % entre le 1er janvier 2021 et le 1er janvier 2023 sur la ville de Clermont-Ferrand. Cette hausse va bien au-delà de l’augmentation de l’indice de référence des loyers (IRL [1]) sur la même période (+ 2,8%) et est l’une des plus importantes observées en France. Cette augmentation est en effet plus importante que dans des villes comme Marseille (+2,2 %), Toulouse (+ 3,1 %), Nantes (+ 3,2 %) ou encore Rennes (+ 4,1 %).  

Le marché locatif privé a partout été mis sous tension sur cette période. L’augmentation des taux d’intérêt a empêché certains ménages de devenir propriétaires, les obligeant à rester locataires. Les logements en location sont devenus plus rares, les loyers ont augmenté. En l’absence de politique d’encadrement des loyers sur le territoire clermontois, les propriétaires-bailleurs ont librement pu augmenter leurs loyers entre deux locataires en bénéficiant de ce contexte de raréfaction de l’offre locative. Pour le moment, malgré l’augmentation observée sur la ville-centre, les loyers clermontois restent parmi les moins élevés du réseau OLL, mais cette situation est à surveiller. 

Une tension accrue sur les petits logements du parc locatif privé dans les secteurs centraux

Les loyers les plus élevés sont dans le cœur historique de Clermont-Ferrand, dans les quartiers 1er mai, des Côtes, dans le centre-ville d’Aubière, à Chamalières ou encore dans les communes d’Orcines et de Ceyrat (loyer médian de 10,1 €/m² à 10,7 €/m² hors charges selon la zone). Dans ces deux dernières communes et le quartier des Côtes, les loyers élevés peuvent s’expliquer par la présence de logements de qualité dans des secteurs recherchés pour leur qualité de vie (commerces, espaces verts, services…). Ailleurs, les loyers élevés s’expliquent davantage par la concentration de petits logements (81 % des T1 et 65 % des T2 du parc locatif privé du Grand Clermont), souvent loués par des étudiants ou de jeunes actifs. Leurs fréquents déménagements contribuent à faire augmenter les loyers de ces petits logements à l’occasion des renouvellements de bail : les emménagés récents payent en moyenne 9 % plus chers leur loyer que les locataires en place (10,1 €/m² contre 9,3 €/m²). Aussi, ce sont sur les petits logements que les premières tensions sur le parc locatif privé et les loyers les plus élevés sont observés : environ 14 €/m² pour un logement d’une pièce loué vide dans les zones centrales. 

La tension sur les petits logements s’explique également par l’essor des locations meublées de longue durée [2] sur le territoire : + 38 % de logements entre 2015 et 2021 [3]. Cette offre locative, essentiellement composée d’appartements et de petits logements, se concentre dans les centres historiques et quartiers péricentraux de Clermont-Ferrand, Aubière, Chamalières et Beaumont et ont des loyers 1,6 fois plus élevés que les logements loués vides. Les propriétaires-bailleurs sont très attirés par la location meublée fiscalement plus intéressante que la location vide, notamment dans un contexte de fin du dispositif Pinel. Toutefois, cette croissance de l’offre meublée dans les zones centrales interroge : avec des prix plus élevés, cette offre est-elle en adéquation avec les moyens financiers des locataires, bien souvent étudiants ou jeunes actifs aux ressources modestes ? 

Au sein du Grand Clermont, les logements aux loyers les plus abordables sont ceux construits avant 1970, avant la première réforme thermique de 1974. Ces logements, situés dans les secteurs centraux, sont moins bien isolés et énergivores. Ils sont donc potentiellement les plus concernés par l’interdiction de mise en location des passoires thermiques (DPE E, F et G) introduite par la loi Climat et Résilience. Ils pourraient, s’ils n’étaient pas rénovés, sortir du marché locatif, contribuant à accentuer la tension sur les logements des zones centrales. Le parc locatif privé clermontois est ainsi confronté à un enjeu de rénovation thermique, notamment afin de continuer de répondre aux besoins de logements de ménages plus modestes. 

La complémentarité des parcs locatifs privé et social pour loger les ménages modestes

A l’échelle du Grand Clermont, les niveaux de loyers médians du parc locatif privé sont 1,6 fois plus élevés que les niveaux de loyers du parc locatif social [4]. Pour autant, une portion de ces deux parcs se louent aux mêmes prix et s’adressent donc à des ménages ayant des revenus qui leur permettent de prétendre à la fois à un logement social et à un logement « bon marché » du parc locatif privé. Selon les travaux du réseau national des OLL [5], cette situation de chevauchement entre les loyers les plus hauts du parc social et les loyers les plus bas du parc privé se retrouve dans les marchés locatifs peu tendus. Elle est représentative d’une complémentarité de l’offre de logements entre parcs privés et publics, qui permet aux ménages modestes de trouver une solution de logements adaptée à leurs besoins dans l’un ou l’autre des parcs. Des loyers peu élevés dans le parc locatif privé permettent en effet d’y loger des ménages aux revenus modestes, potentiellement éligibles à un logement social mais qui ne peuvent pas en obtenir (délai d’attente trop long, trop forte demande de logements sociaux). Le parc locatif privé constitue dans ces conditions une offre locative complémentaire à l’offre locative sociale, essentielle pour limiter les difficultés de logements des plus modestes. 

Sur l’ensemble des EPCI du Grand Clermont, plus de la moitié des locataires du parc privé ont des revenus équivalents à ceux des locataires du parc social. Sur la métropole clermontoise, la situation est plus tendue : des locataires du parc privé ont des revenus inférieurs à ceux du parc social. Il s’agit essentiellement d’étudiants et de jeunes actifs aux faibles ressources. Bien qu’éligibles à un logement social, ils sont à la recherche d’un logement disponible rapidement (rentrée scolaire, début de contrat), ce qui n’est pas compatible avec les délais d’obtention d’un logement social, et doivent se tourner vers les logements les moins chers du parc locatif privé. 

Compte tenu des signes de tension observés [6] sur les deux parcs locatifs, cette complémentarité pourrait être mise à mal. Un écart s’observe déjà pour les logements d’une pièce loués 1,9 €/m² plus cher dans le parc privé que dans le parc public [7]. Si l’augmentation des loyers se poursuit, ces petits logements, déjà les plus chers du parc, pourraient devenir financièrement inaccessibles aux ménages les plus modestes (étudiants et jeunes actifs notamment) excluant de fait ces populations des quartiers centraux où ce parc est souvent concentré.  

Enquête sur les territoires du Massif central en transition : analyse des besoins en ingénierie et fonctionnalités d’un réseau

Former une communauté d’acteurs pour répondre aux enjeux des transitions sur les territoires du Massif central

Le Massif central, marqué par son caractère à la fois montagneux et rural, est particulièrement exposé et vulnérable aux impacts du changement climatique. S’engager dans des démarches de transition constitue désormais une nécessité et implique de repenser nos manières d’habiter, d’aménager et de coopérer à l’échelle du massif. Répondre à ces défis suppose d’inventer de nouveaux cadres d’action, une ingénierie adaptée, ancrée dans les réalités de terrain. C’est dans cette perspective que l’Agence d’urbanisme Clermont Massif central (AUCM) a engagé une enquête exploratoire pour identifier les besoins des territoires en ingénierie de la transition et préfigurer un réseau des acteurs au service d’une dynamique collective et apprenante. Cette initiative s’inscrit dans le prolongement du Plan stratégique d’adaptation au changement climatique du Massif central, avec l’ambition de forger une culture commune de compréhension et d’adaptation au changement global entre tous les acteurs du massif.

Comment accompagner les collectivités du massif vers une ingénierie à la fois pointue, locale et pérenne, capable de concevoir et de porter des projets face aux défis du changement global ?

De l’enquête de terrain à la structuration d’un réseau d’acteurs de la transition

Une enquête en deux volets

La démarche menée par l’AUCM s’est articulée en deux temps :

  • Un questionnaire diffusé aux collectivités du Massif central pour cerner leurs besoins en matière d’ingénierie de la transition ;
  • Des entretiens avec des réseaux existants, afin d’identifier les bonnes pratiques, les écueils et les leviers pour la constitution d’un réseau territorial adapté.

Les résultats de l’enquête ont été complétés par ceux émanant des rapports nationaux au sujet des besoins en ingénierie des territoires ruraux. Les enseignements de l’enquête ont été, par ailleurs, mis en débat avec les membres du Comité de massif, afin de valider collectivement les orientations et dégager des pistes concrètes d’action.

Ce que révèle l’enquête : des difficultés partagées

A travers le questionnaire proposé aux collectivités du Massif central, élus et techniciens ont avant tout souligné leurs difficultés à obtenir des financements disponibles pour mettre en place des projets en lien avec les transitions. Le foisonnement d’offres de financements et d’outils freine les collectivités dans la mobilisation de ces aides. S’ajoute à cela la complexité administrative dans la constitution des dossiers, véritable défi pour certaines collectivités dont les moyens sont limités. Un des freins majeurs à l’engagement des collectivités dans ces démarches de transition est également le manque de compétences spécifiques sur des thématiques nouvelles et parfois pointues. L’enquête révèle une forte attente des collectivités en matière de formation et d’acculturation. Enfin, mutualiser les expériences, valoriser ces actions et créer des collaborations apparaissent comme des leviers essentiels pour engager tous les acteurs et accélérer les actions en faveur des transitions.

L’identification de ces besoins ont permis de dégager huit leviers structurants pour une ingénierie territoriale de la transition territoriale :

  1. Définir, pour construire un diagnostic partagé du territoire : lors de la phase de définition d’un projet, l’enquête a mis en avant le besoin de connaitre les réalités du terrain pour comprendre précisément les enjeux du territoire et prioriser les actions à mettre en place. La stratégie doit, dans ce cadre, s’appuyer sur des méthodes ajustées aux territoires qui prennent en compte ses réalités socio-économiques et ses capacités réelles.
  2. Se projeter, en pensant le territoire dans sa globalité avec pragmatisme : les projets de transition, faisant appel à des registres très variés, nécessitent une approche large pour disposer d’une vision d’ensemble prenant en compte les multiples impacts du changement global. Il s’agit bien de penser le territoire dans sa complexité et sa globalité, en croisant les approches sectorielles (air, énergie, climat, déchets, mais aussi eau, sol, biodiversité, mobilité…), ainsi que les échelles de temps et d’espaces (exemple : logique amont-aval) sans pour autant perdre de vue la nécessité d’agir.
  3. Trouver des ressources locales indispensables pour répondre au mieux aux enjeux tels qu’ils se posent localement : le manque de moyens alloués en termes de financements et de compétences constitue un frein majeur soulevé dans l’enquête par les collectivités. Les programmes, appels à projets ou appels à manifestation d’intérêt sont très nombreux, mais il est souvent difficile pour les collectivités de s’en saisir. Favoriser l’accès à ces financements et améliorer les compétences sont donc une clé de réussite.
  4. S’assurer de la réalité des transformations à engager par une conception et un management de projet orientés vers l’action : La phase de pilotage et d’animation d’un projet nécessite un pilotage pour activer la prise de décision et passer d’une stratégie porteuse de sens à des actions concrètes en déclinaison. La présence d’un chargé de mission dédié à cette étape peut faciliter sa mise en œuvre.
  5. Valoriser les retours d’expérience, pour apprendre de ses pairs : la valorisation est un besoin essentiel, car elle permet à la fois de mettre en avant des projets inspirants et l’implication motivante des collectivités, mais aussi de capitaliser sur les méthodes et les connaissances et de favoriser l’essaimage.
  6. Evaluer pour progresser : le projet ne s’arrête pas à la mise en œuvre des actions : les expérimentations réalisées doivent être évaluées à plus ou moins long terme. Cette phase nécessite de définir des indicateurs adaptés permettant de suivre et de mesurer de manière dynamique les effets des projets mis en place. Il s’agit pour les collectivités de tirer les enseignements des retours d’expérience, mais aussi d’être soucieuses de l’efficience de leurs actions.
  7. Acculturer pour se préparer collectivement : l’enquête met en avant des besoins en termes de sensibilisation, de formation et d’apprentissages collectifs entre acteurs et territoires. Il s’agit de s’entrainer ensemble pour être prêts face aux aléas.
  8. Mobiliser les acteurs : les démarches territoriales en faveur des transitions doivent s’inscrire dans des logiques de dialogue et de synergie en toutes les parties prenantes, de manière à créer de la confiance, dépasser les situations de blocage, faciliter les coopérations et les partenariats.

Cette ingénierie d’accompagnement couvre les trois phases de montage des projets de transition : la phase amont de conception (leviers 1 et 2), la phase opérationnelle de montage et de mise en œuvre du projet (leviers 3 et 4) et la phase de capitalisation (leviers 5 et 6), complétées par 2 leviers transversaux indispensables (leviers 7 et 8).

Vers un « Réseau des territoires du Massif central en transition »

L’offre d’ingénierie existe sur les territoires. Le « réseau des territoires du Massif central en transition » doit prendre en compte cette diversité d’acteurs pour mettre en place des dispositifs complémentaires. Une des fonctionnalités du futur réseau est d’animer les coopérations et les échanges pour favoriser le partage d’expériences et l’acquisition de savoir-faire, et trouver des solutions collectives aux freins existants à la mise en place de projets de transition. Il est également attendu pour proposer une veille informationnelle sur les outils et acteurs existants, et sur les opportunités de financement. Il s’agira surtout de traduire ces opportunités pour permettre à tous les territoires de s’en saisir. Générer de l’envie est primordial pour assurer le fonctionnement du réseau et sa pérennité. Ce travail de veille sera donc complété par la capitalisation des ressources, outils, acteurs et projets existants pour valoriser l’engagement actuel des territoires et favoriser leur implication future.

Un fonctionnement horizontal permettra d’impliquer davantage les parties prenantes. Les formats doivent être fréquents pour maintenir la dynamique. Les objectifs fixés par le réseau doivent être clairs et les réflexions basées sur des cas concrets, opérationnels, adaptés aux contextes territoriaux du Massif central.

A partir des réponses au questionnaire, des entretiens avec des réseaux existants, des recherches bibliographiques, l’AUCM propose de faire travailler le réseau sur 4 fonctionnalités :

  • Monter en stratégie collectivement, à travers un partage sur des retours d’expériences et l’acquisition de savoir-faire.
  • Activer les opportunités, à travers de la veille informationnelle sur les AMI, les opportunités de financements, les programmes, ….
  • Animer les coopérations, à travers la mise en place de scènes d’échanges, de club, en faisant du lobbying territorial, en faisant vivre la « communauté apprenante ».
  • Intégrer collectivement des savoirs nécessaires, en mettant à disposition des espaces ressources et des boites à outils, en faisant notamment une cartographie des acteurs et des projets.

Un tel réseau devra fonctionner selon des modalités souples et horizontales, s’appuyer sur des formats concrets, ancrés dans les réalités locales, et générer une dynamique d’entraînement collectif, pour donner envie d’agir et d’apprendre ensemble.

Conclusion : Vers une ingénierie de proximité, lisible et partagée

L’enquête menée par l’AUCM s’inscrit pleinement dans les constats du rapport interministériel de juin 2025 sur la rationalisation de l’ingénierie territoriale. Celui-ci pointe notamment :

  • Le manque de lisibilité, de disponibilité et d’accessibilité de l’offre actuelle d’ingénierie territoriale pour les élus avec des opérateurs fonctionnant en silo, qui déploient une offre qui peut apparaître redondante, peu coordonnée, voire concurrente dans le cadre d’AP/AMI.
  • La difficulté des territoires à accéder à une ingénierie de qualité, adaptée à leurs besoins spécifiques.
  • La sous-utilisation des ressources locales déjà présentes avec des programmes nationaux qui prennent trop rarement en compte les ingénieries locales existantes, voire parfois foisonnantes.
  • Le besoin urgent de renforcer l’ingénierie de proximité, notamment en milieu rural où les moyens humains disponibles sont souvent très faibles.
  • L’importance de respecter le principe de subsidiarité et de complémentarité pour garantir un équilibre de l’offre, mais également éviter les effets d’aubaine.

Dans ce contexte, la démarche engagée dans le Massif central ouvre une voie prometteuse : celle d’une ingénierie coopérative, en réseau, à l’écoute des territoires. Loin d’être une simple couche technique, l’ingénierie devient un outil de transformation, à condition qu’elle soit lisible, mobilisable et fondée sur la confiance entre acteurs.

Créer une communauté apprenante, c’est doter les territoires d’un pouvoir d’agir partagé, face aux défis du climat, mais aussi des transitions économiques, sociales et démographiques.

C’est ce pari que porte aujourd’hui l’AUCM, avec ses partenaires, pour faire du Massif central un territoire d’innovation collective et d’adaptation solidaire.

Un plan stratégique d’adaptation au changement climatique par et pour les acteurs du Massif central

Entretien avec Paul-Henry Dupuy, commissaire de massif (Commissariat à l’aménagement, au développement et à la protection du Massif central)

Propos recueillis par Stéphane Cordobes, directeur général de l’Agence d’urbanisme Clermont Massif central

Stéphane Cordobes :

Vous venez, avec le commissariat de massif, de concevoir un plan stratégique d’adaptation au changement climatique. Pouvez-vous nous en dire plus ? Et plus particulièrement, expliquer pourquoi le commissariat a été amené à mener ce travail ? Est-ce une obligation légale ? Qu’est-ce qui en est à l’origine ?

Paul-Henry Dupuy :

Effectivement, il y a une obligation légale. La loi Climat et Résilience de 2021 demande à tous les comités de massif d’élaborer un plan d’adaptation au changement climatique. Mais le besoin de travailler sur ce sujet s’était fait sentir depuis longtemps, et il s’était déjà manifesté dans le Massif central. Des acteurs, comme ceux du monde agricole, étaient engagés depuis 2012. Il existait donc une volonté préalable de développer une stratégie d’adaptation. L’obligation réglementaire nous a en quelque sorte imposé – ou plutôt donné – la légitimité pour lancer ce travail.

Stéphane Cordobes :

Quand vous dites “on”, est-ce le commissariat qui parle, ou le commissariat qui parle au nom du comité de massif ? Est-ce une volonté technique que vous exprimez, ou y avait-il également un engagement politique clair pour mener ce travail ?

Paul-Henry Dupuy :

Il y avait une volonté politique, certains acteurs l’ont exprimée. Il y avait également une volonté technique au niveau du commissariat de massif. Il s’agissait de rénover le cadre d’intervention des politiques de massif, et cela impliquait de trouver un nouveau fil rouge mobilisateur. Très rapidement, nous avons identifié que l’adaptation au changement climatique – parce qu’elle était déjà portée par certains – pouvait structurer cette démarche. Jusqu’alors, le fil conducteur était la reconquête démographique du Massif central. Mais ce thème était daté et renvoyait une image du territoire, même si l’enjeu de renouvellement de population et en particulier des actifs perdure, qui ne nous paraissait plus pertinente. En revanche, engager un travail sur l’adaptation de territoires particulièrement impactés permettait au Massif central de se différencier. Aujourd’hui, la dynamique est enclenchée et même si le contexte politique national et international est peut-être moins porteur, la volonté des acteurs du massif s’est manifestée par l’adoption de ce plan, l’enjeu d’adaptation entre dans les mentalités, et cela nous permet d’envisager de construire une image renouvelée d’un Massif central engagé dans l’adaptation.

Stéphane Cordobes :

On sait que ce type d’exercice – construire un projet de territoire, un plan d’adaptation – nécessite des moyens en ingénierie importants. Et dans votre cas, on peut même parler d’une ambition forte. Vous avez par ailleurs fait le choix de privilégier l’ingénierie locale. Pouvez-vous en dire un peu plus, à la fois sur ce besoin en ingénierie et sur ce choix de travailler avec des acteurs du territoire ?

Paul-Henry Dupuy :

Travailler à l’échelle du Massif central pose toujours une difficulté liée à la taille du territoire. Il s’agit d’un territoire aussi vaste qu’un pays : 85 000 km². Il fallait donc adopter une approche différente de celle qu’on peut mener à l’échelle d’un EPCI ou d’un PETR. Nous avons compris très vite que nous ne pourrions pas produire un document définissant, point par point, tout ce qu’il faudrait faire territoire par territoire. En revanche, il nous semblait essentiel de faire en sorte que les acteurs puissent s’exprimer.

Cela correspond aussi à l’esprit de la Loi montagne, c’est-à-dire à une logique d’auto-développement des territoires : un développement ascendant, fondé sur la volonté des acteurs. Il fallait donc toucher l’ensemble des territoires du massif, à la fois géographiquement et sectoriellement. Les institutions, les milieux économiques, les élus devaient pouvoir participer. Le besoin d’ingénierie était évident, car nous n’avions pas, à nous seuls, les compétences pour animer une telle démarche. Il y a un vrai savoir-faire à mobiliser pour permettre aux gens de s’exprimer, et pour les nourrir en retour avec des apports scientifiques ou techniques.

Pourquoi une ingénierie locale ? Parce que c’est fondamental de travailler avec des personnes qui connaissent les modes de vie, les réalités du territoire. Et aussi avec des structures qui ont une expérience de l’animation sur des sujets d’aménagement ou de planification. Ce que nous voulions construire, c’était une stratégie pour le Massif central à l’horizon 2050. Des acteurs comme l’Agence d’urbanisme Clermont Massif central, qui produit des projets de territoire, des SCoT, etc., sont donc tout à fait adaptés. Nous savions que cette agence était sensible aux questions climatiques, qu’elle articulait bien ces enjeux avec les problématiques d’aménagement, et qu’elle maîtrisait les démarches collaboratives. Il n’y a pas vraiment eu d’hésitation.

Stéphane Cordobes :

Ce type de démarche est souvent engageant. Parfois difficile ou douloureux, parfois enthousiasmant. Maintenant que le plan est élaboré, en cours de diffusion et de déploiement, si vous deviez revenir sur l’expérience : qu’avez-vous appris ? Qu’avons-nous appris collectivement ? Ce fut un travail de plus d’un an, avec des réunions régulières, des apports d’experts… Que retenez-vous de cette séquence ?

Paul-Henry Dupuy :

Avant de parler de ce que nous avons appris, je voudrais insister sur les choix forts qui ont été faits. Ces choix n’auraient pas été possibles sans un échange étroit avec l’agence d’urbanisme. Cela nous a permis de construire la méthode, de nous rassurer sur les attendus, de distinguer l’essentiel de l’accessoire, le tout dans un climat de confiance.

Un des choix structurants a été de réunir les participants pendant un an, à huit reprises, en présentiel, sur le massif. Ce n’était pas une évidence, car les déplacements sont longs et contraignants. Mais nous avons fait ce pari. De votre côté, vous étiez convaincus que c’était la bonne méthode pour embarquer les acteurs. J’ai pris un risque, mais je n’ai aucun regret. Aujourd’hui, il existe un collectif qui s’est formé, qui veut continuer à travailler, qui considère ce plan comme le sien. Nous avons réussi à faire émerger quelque chose.

Ce que cela nous a appris, c’est d’abord qu’il y a un intérêt réel pour travailler sur l’adaptation. C’est un sujet fédérateur. Nous avons réuni des personnes qui, au départ, n’avaient pas les mêmes intérêts, ni les mêmes convictions. Et plus nous les réunissions, plus elles avaient envie de participer, de passer à l’action. À la fin du cycle, elles demandaient à poursuivre. Pourtant, la démarche était exigeante.

Cela m’a conforté dans l’idée que notre mode de fonctionnement issu de la loi Montagne – qui vise à mobiliser une communauté d’acteurs pour orienter, donner un cap au massif – fonctionne. Cette communauté s’est sentie investie. Elle s’est emparée du sujet. Nous avons ravivé l’esprit d’auto-développement dans les politiques de massif. Les participants se sont dit : “Il faut qu’on prenne les choses en main”, “On ne peut pas attendre”, “Si on anticipe, on peut s’en sortir, et même se différencier”.

Stéphane Cordobes :

Vous évoquez une diversité de points de vue au sein du collectif. Or c’est un sujet qui peut générer de l’anxiété, de la controverse, du conflit. Ce collectif, très attaché au territoire, ne partageait pas toujours la même opinion, ni les mêmes orientations politiques ou idéologiques. Pourtant, vous dites qu’au fil des rencontres, l’envie de poursuivre s’est affirmée. Est-ce que cette fabrication du collectif constitue, autant que le plan lui-même, une réponse au trouble que génère ce sujet ?

Paul-Henry Dupuy :

Oui, c’est une réponse à ce trouble, à cette forme d’anxiété qui accompagne ce sujet. La démarche que nous avons menée a permis d’exprimer et de confronter les points de vue, sans les opposer. Chacun ressentait, d’une manière ou d’une autre, une inquiétude. Mais ce qui nous a rassemblés, c’est un attachement fort au territoire. Cet attachement a été exprimé à plusieurs reprises. Les acteurs sont fiers du Massif, et veulent continuer à y vivre, à le faire vivre. Cela permet de dépasser le trouble. C’est compliqué, mais on s’y met ensemble, et cela renforce le sentiment d’appartenance.

Nous avions aussi pris le parti de ne pas rendre la démarche écrasante. Il ne s’agissait pas d’enjoliver la réalité, mais de rappeler régulièrement qu’il restait une capacité d’agir. Que le Massif central de 2050 pouvait encore correspondre à nos désirs, en tenant compte des contraintes. Cette posture – pas optimiste, mais donnant une visibilité – a été décisive. Elle a limité les tensions entre les participants, malgré des intérêts divergents, et elle a atténué le caractère anxiogène du changement climatique.

Stéphane Cordobes :

Dans la méthode, vous avez choisi d’intégrer dès le début des illustrateurs, des médiateurs graphiques, en immersion complète lors de tous les temps de travail. Ils ont produit de nombreuses planches, constituant presque un récit graphique de cette aventure collective. Quelle était l’intention de départ ? Et quel regard portez-vous aujourd’hui sur ce choix ?

Paul-Henry Dupuy :

Avec le recul, je considère que c’était une très bonne décision. Je ne saurais plus dire précisément comment l’idée est née, mais dès le départ, nous voulions que cet outil soit facilement diffusable, agréable à lire. Il nous fallait un média de communication grand public. D’où les médiateurs graphiques. Il y avait aussi cette volonté d’avoir un regard extérieur, un peu décalé. C’est toujours délicat pour moi, en tant que commissaire de massif, de dire certaines choses. Je représente l’État. Le médiateur graphique, lui, peut se permettre plus de liberté, provoquer le débat. C’est comme pour l’ingénierie externe : l’intervenant extérieur peut dire ce que nous ne pouvons pas dire.

Il y avait deux volets à cette médiation graphique. Le premier, c’était le dessin en direct, pendant les séances : les illustrateurs captaient des verbatims, les représentaient immédiatement. Même les phrases dures devenaient discutables, car elles étaient mises en image, parfois avec humour. Cela détendait l’atmosphère. Les dessins étaient affichés dans la salle, les participants voyaient que leurs propos n’étaient pas censurés. Nous les avons tous conservés. Ils seront bientôt exposés, sans filtre.

Le second volet, c’était un carnet de voyage. Un récit illustré, de la première séance à la dernière, en mars. Presque une chronique, dans un style proche du journalisme. Et c’est un support très efficace, y compris pour la diffusion. Plus lisible qu’un compte-rendu classique. Dans certaines collectivités, un seul représentant assistait aux réunions, mais tout le service lisait les épisodes du carnet. Cela prouve l’intérêt du format.

Stéphane Cordobes :

Le plan d’adaptation débouche sur cinq clés stratégiques. Pourquoi ce mot de “clé” ? Et en quoi ces clés permettent-elles, selon vous, de transformer les manières de faire territoire, de s’adapter à l’échelle du Massif central ?

Paul-Henry Dupuy :

C’est une très bonne illustration de ce que le collectif a produit. Assez vite, grâce au temps pris pour dialoguer et écouter, les acteurs ont compris qu’il fallait adopter une approche transversale, coopérative. Cinq leviers ont émergé – nous les appelions ainsi au début. Des leviers d’adaptation volontairement transversaux, là où les documents stratégiques classiques fonctionnent par thématiques : agriculture, tourisme, gestion de l’eau, …

Nous avons évolué vers cette idée de “clés”, venue naturellement. Ce mot évoque l’action, la capacité à déverrouiller des blocages. Et pour cela, il faut une approche intégrée. Les cinq clés retenues – partage des ressources, diversification, décarbonation, revitalisation, coopération – reprennent et réinventent des logiques connues dans les politiques de massif. Elles ne sont pas déconcertantes. Elles parlent aux acteurs.

Prenons “diversification” : cela évoque l’économie, c’est positif, y compris pour des personnes peu à l’aise avec l’idée de transition. Idem pour “revitalisation”, qui renvoie à un vocabulaire territorial fort. Les acteurs veulent un territoire habité, vivant, partout. On ne parle pas seulement de sobriété ou de transition agricole. On emploie des mots dynamiques, accessibles. Ce n’est pas une posture de continuité, mais une manière renouvelée d’aborder les sujets.

Surtout, ces cinq clés peuvent être mobilisées localement. Elles sont adaptées à tous types d’acteurs : petites collectivités, grandes intercommunalités, filières économiques. Elles offrent un cadre d’action pour que le plan soit approprié, décliné concrètement.

Stéphane Cordobes :

Vous avez dit que cela avait permis de fédérer une communauté, et que vous aviez veillé à ce que les mots choisis soient entendables. Mais au-delà du plan et de ses formulations – y compris artistiques ou graphiques – il faut aussi que cela produise des effets. Il faut que ce soit performatif. Vous attachez beaucoup d’importance au déploiement. Il ne s’agissait pas de faire un plan pour faire un plan. Il s’agit maintenant de le faire vivre, de susciter des initiatives concrètes. Vers quoi allez-vous ? Y a-t-il déjà des projets identifiés ? Concrètement, comment se déploiera-t-il dans les prochains mois ?

Paul-Henry Dupuy :

Le déploiement passe d’abord par la diffusion. C’est une évidence. Mais je voudrais revenir un instant sur la conception même du plan, car cela éclaire notre approche. Ce plan, ce n’est pas une planification stricte. C’est un outil mis à disposition de tous les acteurs pour susciter l’envie d’agir, pour accompagner l’adaptation.

Il contient une base de diagnostic très complète, que chaque territoire peut s’approprier. Il propose aussi une méthode d’embarquement d’un écosystème d’acteurs – c’est le récit de notre travail collectif. Chaque territoire, chaque filière, peut s’en inspirer, voir que c’est possible. À condition d’y consacrer du temps, de l’animation. C’est essentiel.

Les cinq clés offrent ensuite un cadre structurant pour établir une stratégie locale d’adaptation. Enfin, le plan recense de nombreuses actions déjà engagées. Ce sont souvent des démarches légères, sans regret, mais elles montrent que c’est faisable. L’objectif est donc de donner envie, et de fournir les premiers repères.

La première étape est donc de diffuser largement. D’expliquer, de faire de la pédagogie. Notamment en lien avec les autres démarches de planification écologique. Ce plan doit pouvoir contribuer aux objectifs d’adaptation.

La deuxième étape, c’est créer les conditions de la massification. Il faut que les territoires du Massif central s’engagent. Cela suppose d’inventer des méthodes d’accompagnement, de mobiliser une ingénierie adaptée – y compris pour les territoires qui en sont aujourd’hui éloignés.

Dès 2025, le commissariat financera des projets d’expérimentation. Des méthodes d’accompagnement appliquées dans des territoires pilotes. Des approches différenciées, parfois thématiques : sur l’eau, sur les risques, sur l’éducation au risque… avec des contenus spécifiques. L’idée est de constituer une gamme large, adaptée à toute typologie de territoire.

Il faudra aussi convaincre les financeurs. Leur montrer que ces démarches sont utiles, efficaces, et qu’elles méritent d’être soutenues. Pour que l’adaptation se déclenche partout.

Stéphane Cordobes :

Vous évoquez là les deux extrémités de la chaîne : les acteurs de terrain d’un côté, les financeurs de l’autre. Et entre les deux, il y a l’ingénierie. Vous avez travaillé avec notre agence, mais aussi avec d’autres. Ce qui est intéressant, c’est que vous ne cherchez pas à privilégier un acteur, mais à faire converger les ressources existantes, locales et nationales, pour créer une sorte de “pack” d’acteurs au service de l’adaptation. Est-ce bien cela ?

Paul-Henry Dupuy :

Oui, exactement. C’est le grand chantier qui s’ouvre. Nous allons le lancer avec l’appui de l’Agence d’urbanisme, à travers la création d’un réseau des acteurs pour l’adaptation du Massif central. Le nom n’est pas encore arrêté.

Ce réseau comprendra une communauté de territoires engagés, qui pourront en inspirer d’autres. Mais surtout un ensemble – un “pack”, comme vous dites – d’acteurs de l’ingénierie, qui devront se structurer en complémentarité. Pour répondre à tous les besoins : par sujet, par type de territoire, par profil d’acteur.

Il faudra connecter tout cela. Mobiliser les ingénieries locales déjà existantes, bien implantées, pour les orienter davantage vers l’adaptation. Il n’est pas nécessaire de tout réinventer. Nous avons des ressources, des personnes compétentes, qui connaissent les spécificités du territoire. Il s’agit de les mettre en réseau avec des expertises plus pointues, parfois extérieures.

C’est cela qu’il faut orchestrer. Et c’est une clé de réussite, non seulement pour le Massif central, mais au-delà. C’est le chantier que nous allons ouvrir, avec un premier temps fort prévu le 30 septembre pour en poser les fondations.

Stéphane Cordobes :

Dernière question : ce plan ne va-t-il pas aussi transformer le commissariat lui-même, ou le comité de massif ? Est-ce que ce travail va vous amener à faire évoluer vos objectifs, vos modes de fonctionnement, vos leviers de financement ?

Paul-Henry Dupuy :

Quand le comité de massif a adopté, le 23 mai, le plan stratégique d’adaptation au changement climatique, il a affirmé que l’adaptation devenait la priorité des politiques publiques de massif. C’est désormais le fil rouge.

Cela implique que le commissariat, qui gère les crédits de l’État pour le Massif central, mais aussi les autres partenaires (régions, départements), doivent interroger leurs dispositifs pour les aligner sur cette priorité. Je laisse à chacun le soin de porter ces réflexions. En ce qui concerne l’État, nous allons faire évoluer nos manières de travailler. Nous allons prioriser les projets qui relèvent de l’adaptation, en nous appuyant sur les cinq clés. Et dans un contexte de moindres moyens, cette ligne claire est nécessaire. Ce plan nous aidera à orienter nos financements.

Stéphane Cordobes :

Est-ce que cela ira jusqu’à une révision du document cadre, le schéma de massif ?

Paul-Henry Dupuy :

Oui, j’aurais même dû commencer par là. Quand le comité dit que l’adaptation devient la priorité, et que les cinq clés structurent cette vision, cela implique forcément une révision du schéma. C’est notre document stratégique de référence. Et le vote à l’unanimité du plan nous conforte dans l’idée que cette révision est possible, et attendue.

Les lacs de Thiers Dore et Montagne dans l’adaptation au changement climatique

Lauréate de l’appel à candidatures « Territoires de lacs du Massif central »[1], la Communauté de communes Thiers Dore et Montagne a élaboré une feuille de route pour un tourisme durable et équilibré à l’échelle de ses trois bases de loisirs. Dans un contexte de changement climatique, cette stratégie intégrée et partenariale vise à adapter le modèle de développement territorial en repensant la place et la fonction des lacs dans le territoire. Ces derniers sont en effet susceptibles de jouer un nouveau rôle dans une délicate équation sociale, économique et environnementale du territoire. D’un côté, ils peuvent répondre aux attentes des clientèles touristiques en recherche d’espaces tempérés dotés d’une offre de loisirs accessible et de qualité. De l’autre, ils peuvent renforcer l’habitabilité du territoire et offrir à ses habitants des points récréatifs et rafraîchissants. Ces opportunités ne doivent cependant pas masquer le fait que ces lacs sont eux-mêmes affectés par le changement climatique qui exerce des pressions sur l’ensemble des milieux naturels. Enfin, considérant les impacts environnementaux de certaines pratiques, l’impulsion d’une dynamique autour de la transition écologique des lacs peut être un facteur de différenciation et de montée en qualité de l’offre. Tout l’intérêt du dispositif repose de fait sur cette invitation à concevoir un projet gagnant-gagnant pour la collectivité, en soutenant son habitabilité et son développement, et son milieu de vie, en préservant son écosystème et les services qu’il assure. 

Trois lacs artificiels amenés à se diversifier 

La Communauté de communes Thiers Dore et Montagne dispose de trois lacs à Thiers, Aubusson d’Auvergne et Saint-Rémy-sur-Durolle, d’origine artificielle, aménagés entre 1960 et 1980 dans le cadre de la politique nationale de déploiement de promotion des espaces de plein air[2]  ouverts à la population. Ces trois lacs présentent des positionnements distincts, directement liés à leur inscription territoriale et à leurs usages. 

  • Saint-Rémy-sur-Durolle mise sur l’attractivité et le vivre-ensemble intergénérationnel, en confortant son image de station touristique familiale et populaire, ancrée dans un cadre verdoyant. L’ambition est de maintenir une fréquentation de proximité inclusive, y compris pendant la saison estivale. 
  • Aubusson d’Auvergne revendique une forme de sobriété et de frugalité, avec l’ambition d’affirmer son statut de lieu refuge. Le site valorise son image de lac “nature”, peu urbanisé, en s’adressant à la fois aux habitants locaux, aux métropolitains en quête de ressourcement, et aux touristes internationaux sensibles à la préservation de l’environnement. 
  • Iloa Rives de Thiers, enfin, s’inscrit dans une logique d’hyper-proximité et d’apprentissage transgénérationnel, en renforçant son rôle de parc urbain de loisirs et d’activités sportives pour le bassin thiernois. Il s’adresse prioritairement aux populations locales, notamment pour ceux qui ne peuvent partir en vacances, tout en accueillant des touristes de passage. 

Les bases de loisirs sont amenées à évoluer de manière à conforter l’attractivité de ces sites et à les dynamiser dans le cadre de la politique économique et touristique des territoires3 et face aux impacts du changement climatique. Pour Thiers Dore et Montagne, il s’agit plus particulièrement d’accroître sa notoriété, sa dynamique économique et de favoriser son positionnement comme destination touristique au sein du Massif central et de la Région Auvergne-Rhône-Alpes, tout en œuvrant à la préservation d’un bien commun, en sensibilisant les acteurs locaux à la vulnérabilité de ce milieu et à l’importance de sa préservation, en intégrant dans la réflexion l’ensemble du bassin versant. Le projet prend la forme d’une démarche globale lancée par l’intercommunalité comme cheffe de file, rassemblant les différents acteurs publics, privés, associatifs du territoire (loisirs, pêche, développement durable, économique, entretien des espaces publics…). Cette dynamique partenariale et participative avec l’ensemble des parties prenantes des trois sites est déterminante. Elle permet de couvrir les thématiques propres au renouvellement de la stratégie touristique dans un contexte de changement climatique, tout en intégrant le souci de concilier dynamique touristique et vie locale. 

Des impacts et conséquences à anticiper pour penser la fonction à venir des trois lacs 

Si les lacs constituent des lieux plébiscités durant la période estivale, ils n’en présentent pas moins des risques de changements, de tensions, voire de ruptures qu’il convient d’anticiper pour en faire évoluer les représentations, repenser les usages et adapter les pratiques. Identifier leurs vulnérabilités, mais également leurs forces dans les années à venir, permet de repenser le rôle économique, mais également social et environnemental de ces trois sites. 

 Les impacts du changement climatique se concentrent sur la saison estivale, période durant laquelle les usages autour des lacs sont les plus intenses. Le principal impact concerne l’eutrophisation, notamment la prolifération de cyanobactéries, qui touche l’ensemble des activités pratiquées autour des plans d’eau. L’interdiction de baignade qui en découle entraîne une chute importante de la fréquentation. La diminution du niveau d’eau rend certains équipements difficilement accessibles. Par exemple, les quais fixes de la base de loisirs d’Aubusson deviennent inadaptés. La pêche est également affectée par le manque d’eau et les fortes chaleurs, provoquant la surmortalité des espèces sensibles, ces effets sont accentués en cas de dégradation de la qualité de l’eau. L’appauvrissement de la biodiversité dans les lacs est manifeste depuis 25 ans. Cette érosion rend le territoire moins attractif, car il y a moins d’espèces à observer et à montrer. Elle exige une adaptation des actions d’éducation à l’environnement, pour accompagner les publics dans la compréhension de cette évolution. Les vagues de chaleur et les précipitations intenses modifient par ailleurs la fréquentation des sites et perturbent l’organisation des événements. Les visiteurs recherchent désormais la fraîcheur, en altitude ou le long des eaux vives. Dès qu’une certaine température est dépassée, les lacs sont délaissés. Les horaires de baignade et les départs d’activités sportives sont décalés aux périodes les plus fraîches, en matinée ou en soirée. Les activités tendent alors à se reporter sur les saisons intermédiaires durant lesquels le confort thermique est souvent meilleur. Ce décalage pose cependant la question de la surveillance de la baignade et du contrôle de la qualité de l’eau portant sur la saison estivale. Le déplacement de la fréquentation pose aussi un risque pour la faune et la flore en pleine période de reproduction et de germination au printemps. 

Dépasser l’anthropocentrisme : des lacs refuges pour les vivants 

Les lacs ne peuvent plus être pensés exclusivement comme des espaces au service des humains, mais comme des lieux de vie pour l’ensemble des vivants. Ce changement de perspective impose de maîtriser la pression sur les sites et de sortir d’une approche anthropocentrée, pour une lecture partagée des vulnérabilités. 

Initialement pensés pour le bien-vivre de la population, les trois lacs sont à considérer dans toutes les fonctions qu’ils remplissent, notamment les services rendus à la nature. Il ne s’agit plus de les « vendre » comme vitrines touristiques, mais de les penser comme refuges pour les vivants. Cela suppose une stratégie de (re)conciliation entre des enjeux multiples : 

  • Écologique : préservation de la biodiversité et de la qualité de l’eau ; 
  • Économique : développement d’un tourisme durable, montée en gamme de l’offre ; 
  • Culturel et identitaire : valorisation du patrimoine naturel et immatériel ; 
  • Social : consolidation d’un lieu de vie, de détente et de lien social pour tous les publics. 

Dans cette perspective, les lacs ne peuvent plus être pensés uniquement comme des “vitrines” de l’attractivité touristique, mais doivent être reconnus comme des lieux de vie partagés, au service du bien-être des habitants comme des non-humains. 

La feuille de route adoptée par la collectivité pour un tourisme durable et équilibré à l’échelle des trois lacs vise ainsi six objectifs :  

  1. Diversifier et désaisonnaliser l’offre touristique et de loisirs par le développement d’activités tout au long de l’année, à la fois à destination des touristes et des habitants, en faisant la part belle aux activités de plein air ou en phase avec les valeurs de développement durable. 
  1. Associer les acteurs économiques locaux afin d’articuler la stratégie des lacs aux activités économiques du territoire, mais également d’améliorer la gestion des plans d’eau et de leurs alentours. 
  1. Faire des lacs des lieux de rafraîchissement et de lien social afin que la démarche ait des impacts en matière d’amélioration de la qualité de vie des habitants du territoire, notamment les plus vulnérables face aux effets du changement climatique. 
  1. Garantir la qualité de l’eau dans une logique de bassin versant incluant les affluents afin de restaurer la qualité physico-chimique des milieux, d’assurer la gestion quantitative de la ressource tout en veillant à la qualité des eaux de baignade. 
  1. Préserver et valoriser la biodiversité et les valeurs fortes du paysage par site, mais également sensibiliser les habitants et les usagers des lacs à la richesse de leur environnement. 
  1. Améliorer l’accessibilité en privilégiant les modes de transports actifs, l’accessibilité des sites, les liaisons douces et les infrastructures de mobilité. 

 Conclusion : face au changement climatique, un rôle élargi à jouer 

Dans un contexte de réchauffement climatique, les trois lacs prennent une dimension nouvelle comme lieux de fraîcheur et de refuge, en particulier pour les publics vulnérables : enfants, personnes âgées, habitants de bouilloires thermiques. L’approche systémique retenu dans le cadre de la démarche « Territoire de lacs » a permis de prendre conscience de la naturalité et des services écosystémiques qu’offrent ces sites pourtant artificiels, pensés initialement pour le tourisme et les loisirs, et désormais prêtant attention à l’ensemble des vivants. Malgré leur origine anthropocentrée en tant que bases de loisirs, les trois sites, en tant que territoires de lacs dont l’intérêt en termes de réservoir de biodiversité et de naturalité s’impose, sont désormais inscrits dans une dynamique de transition écologique. Si le sujet du renoncement définitif à la baignade ne suscite pas une acceptation générale des acteurs du territoire, cette hypothèse a néanmoins été posée comme une éventualité à prendre en considération. La vocation de territoire refuge des lacs est élargie au-delà de la seule baignabilité. Ils sont désormais appréhendés plus largement comme des lieux de rafraîchissement, voire des portes d’entrées d’un réseau de points de fraîcheur maillant le territoire de Thiers Dore et Montagne. Néanmoins, la mise en application du plan d’actions sur le long terme nécessite que la population et les usagers des lacs soient favorables aux actions déployées. Les trois lacs de Thiers Dore et Montagne peuvent, dès lors, faire figure de terrains d’expérimentation et de mobilisation autour de l’adaptation au changement climatique, au service non seulement du secteur du tourisme et des loisirs, mais également plus largement des territoires de montagne. 

Pas d’adaptation locale au changement global sans coopération ni expérimentation interterritoriale: la raison d’être d’une agence d’urbanisme

1. Bien Habiter localement dans un monde de plus en plus instable et incertain

L’Agence d’urbanisme de Clermont agit dans un contexte de profondes transformations. Si la situation n’a rien d’original — elle affecte les espaces de vie et les milieux de la planète entière — elle oblige néanmoins, à chaque échelle locale, à se mobiliser pour y faire face. Engager ce que nous appelons aujourd’hui des “transitions” requiert d’affronter collectivement une série d’instabilités structurelles qui redéfinissent nos cadres d’analyse et d’intervention. Ces instabilités ne se limitent pas aux dimensions climatiques ou environnementales, ni à celles en cours d’explosions économiques et géopolitiques. Elles concernent tout autant les équilibres sociaux et politiques que les représentations et les affects. En un mot, toutes les relations qui conditionnent nos conditions, et possibilités, de cohabitation dans nos territoires de vie. 

Cette instabilité généralisée prend donc plusieurs formes, qui ne se juxtaposent pas, mais s’entrelacent et se cumulent. Elle est d’abord écologique et spatiale : les environnements de vie se modifient rapidement, parfois irréversiblement, remettant en question l’habitabilité même de certains territoires. Ces transformations affectent nos manières de voir et de penser, produisant une instabilité cognitive et symbolique : les repères collectifs s’effacent, les récits hérités vacillent, les finalités de l’action publique se brouillent. Comme le souligne Donna Haraway, ce n’est pas seulement le monde qui devient trouble, mais nos cadres d’analyse eux-mêmes. Cette perte de lisibilité s’accompagne d’une instabilité politique et sociale : les tensions s’aiguisent, les inégalités se creusent, les usages du territoire se confrontent, les formes de coopération se fragilisent. Là où l’on pensait que la rareté favoriserait les rapprochements — la « sobriété » foncière dans le cadre du ZAN en est emblématique — on observe au contraire un repli sur soi qui accentue encore les vulnérabilités. 

Au cœur de ces déséquilibres, une instabilité sensible et affective se manifeste : sentiment d’impuissance, peurs diffuses, mais aussi perte d’attachements ordinaires — ces liens discrets, quotidiens, souvent invisibles, qui faisaient tenir ensemble les lieux, les personnes et les usages. Il est peu de dire que ces instabilités produisent du trouble. Elles bousculent les cadres établis, mais elles ouvrent aussi des possibles. Encore faut-il savoir les entendre, les formuler, les travailler. C’est précisément là que réside le rôle d’une agence comme la nôtre : ne pas contourner l’incertitude, mais en faire le point de départ d’une modalité d’accompagnement de l’action publique lucide, située, partagée. 

2. Les nouvelles conditions d’exercice des métiers de l’urbanisme et de l’aménagement

Ces mutations n’affectent pas seulement les territoires. Elles transforment en profondeur les conditions mêmes d’exercice du métier d’urbaniste et d’aménageur. Elles obligent à repenser les savoirs, les postures, les modes de faire, les « expertises », les conditions mêmes d’intervention. 

Épistémologiquement d’abord : les connaissances disponibles ne suffisent plus à appréhender la complexité et l’instabilité actuelles. Les savoirs sont hétérogènes, situés, parfois contradictoires. Il ne s’agit plus de produire une vérité stabilisée, mais de rendre visible et créative la diversité des perspectives. Il s’agit aussi d’être en mesure de mobiliser une multiplicité d’expertises — scientifiques, pratiques, d’usage — qu’aucune structure seule n’est aujourd’hui capable d’intégrer. Le recours au partenariat est devenu aussi indispensable que difficile à mettre en œuvre, dans un monde optimisé, où le temps manque à chaque institution pour prendre du recul, se questionner et a fortiori coopérer. Dans un monde qui a érigé la compétition et le marché en modèle, la coopération qui suppose confiance et don/contre don peine à exister. 

Déontologiquement ensuite : il faut assumer une posture plus modeste, plus réflexive, plus attentive aux asymétries de pouvoir et aux inégalités d’accès à l’expression, à la diversité composant les communautés territoriales. Le mythe du grand récit et du sauveur a la vie dure. Il ne s’agit plus seulement de s’inscrire dans une vérité unique surplombante et héroïque, de la traduire et de l’appliquer, mais d’écouter, de relier, de partager, de faire converger une multitude de petits récits performatifs, d’alliance en actes autant qu’en mots. Là encore, la modernité et son productivisme effréné deviennent un frein malgré les promesses numériques. Face à l’injonction de faire mieux avec moins — moins de temps, moins de ressources, moins de distance, moins de bienveillance — quelle posture inventer localement et collectivement pour préserver un espace de travail plus ouvert, assurément plus créatif, et moins “productif” au sens court-termiste de la modernité tardive? 

Mais la transformation est aussi très concrète. Elle est fondamentalement pratique. Elle appelle un renouvellement des formes d’intervention : sortir des logiques de commande, éviter les réponses standardisées, assumer des démarches longues, progressives, inscrites dans la durée et la proximité. Moins les plans définitifs que des processus continus, itératifs et intégrateurs. Car coconstruire, coproduire, collaborer, cohabiter ne relève pas du seul discours managérial et politiquement correct, ni du marketing vert. Ce sont des investissements à part entière – et non du fonctionnement auquel on les ravale dans nos logiques comptables courantes – pour se donner collectivement la capacité de faire face. Ce travail demande du temps, de la présence, de la confiance, une attention soutenue aux contextes, aux dynamiques locales, à ce que lie davantage qu’à ce qui délie. 

Cette transformation du métier affecte évidemment les professionnels eux-mêmes. Les équipes de l’Agence sont traversées par les mêmes incertitudes que les acteurs qu’elles accompagnent. Elles doivent elles aussi ajuster leurs compétences, leurs méthodes, leur rapport à la légitimité tout en s’interrogeant sur leur avenir et les craintes qui l’accompagnent, comme professionnels et habitants. Cela suppose une organisation qui autorise le tâtonnement, le droit à l’erreur, la transversalité en même temps qu’elle donne sens au travail effectué. Une organisation qui reconnaît que la fabrique urbaine et territoriale dans ce monde instable est, en interne à l’agence comme en externe avec les adhérents et partenaires, un apprentissage collectif, et non une capacité à répondre mécaniquement à des commandes, elles-mêmes souvent dictées par des obligations réglementaires vécues comme des contraintes inutiles et coûteuses. 

3. Non plus aménager et urbaniser, mais inventer une politique culturelle de l’habiter

Accompagner les territoires dans ce contexte ne peut se réduire à une ingénierie de commande et d’automatismes. Il s’agit d’un travail culturel au sens fort, créatif : un travail qui porte attention aux formes de vie, aux manières d’habiter, aux attachements, aux représentations, aux imaginaires. Un travail qui accepte de sortir de la seule logique d’instrumentation quantitative et de performance technique, trop souvent dominante dans nos métiers. 

Accompagner, ce n’est pas seulement produire de la méthode au sens courant du terme. Cette fameuse méthode que l’on apprend à l’université, qui se transmet d’experts à apprentis, et qu’il s’agirait d’appliquer rigoureusement ensuite sans réflexivité. C’est avant tout produire du sens — direction et signification comprises. C’est à cette condition que l’adaptation peut devenir concrète, partagée, démocratiquement engageante. L’Agence de Clermont s’inscrit résolument dans cette voie malgré ses moyens réduits. Elle contribue, à son humble niveau donc, à l’élaboration de ce que pourraient devenir des politiques culturelles de l’habiter, en rendant visibles et intégrant pleinement les dimensions sensibles, symboliques, sociales constitutives de nos manières de vivre les territoires. 

Cela suppose aussi de mobiliser, aux côtés des savoirs techniques et scientifiques, des savoirs artistiques et artisanaux. Non pour illustrer ou enjoliver les démarches, mais pour ouvrir d’autres registres de perception, d’enquête, de partage. C’est par ces frottements que se construit une lecture plus fine, plus incarnée des transformations à l’œuvre. Ce travail ne relève pas d’un modèle sur étagère, mais d’un bricolage — au sens anthropologique du terme. Il s’agit de faire avec ce que l’on a, d’assembler, de détourner, de composer, dans une logique de réinvention pragmatique et située. C’est ainsi que l’on peut construire, dans l’instabilité même, le trouble, de nouvelles formes d’habiter. 

4. Façonner une communauté apprenante de l’adaptation par la coopération interterritoriale

La coopération n’est pas un supplément. Elle n’est pas une méthode parmi d’autres. Elle est structurellement nécessaire, car l’adaptation ne peut se concevoir qu’à plusieurs. Elle ne prend sens qu’à l’échelle interterritoriale et suppose une solidarité active entre acteurs, institutions et territoires. Ce que l’Agence cherche à nourrir, ce n’est pas seulement une mutualisation d’études ou un alignement de diagnostics. C’est la constitution progressive d’une communauté apprenantes d’acteurs, créative, expérimentale. Une communauté qui accepte les désaccords, les tensions, les conflits d’usage. Qui sait que ceux-ci ne sont pas des anomalies, mais des révélateurs à travailler collectivement pour les transformer en leviers. 

Ces désaccords sont rarement de nature exclusivement idéologiques, surtout localement. Quelle place d’ailleurs restera-t-il à l’idéologie quand la vulnérabilité de nos milieux de vie imposera, sous contrainte environnementale, des arbitrages si l’on tarde à s’adapter pourrait devenir autrement plus radicaux ? Les considérer comme des constructions purement rationnelles serait donc une erreur : ils renvoient à des vécus, des affects, des vécus, des liens subtils. Ils traduisent le poids de l’histoire, des représentations, des formes d’impuissance. C’est en tant que tels qu’Ils doivent être abordés frontalement – au risque sinon de devenir des blocages insurmontables — mais dans un cadre sécurisant, ouvert, respectueux. Cela peut paraître aventureux de se lancer dans tels dévoilements, mais c’est l’effort et le risque nécessaires à l’installation d’un dialogue, d’une production collective qui donne sa force au pragmatisme local si nécessaire. 

La méthode partenariale est ici un levier décisif : elle permet de construire du commun sans effacer les différences, de réguler sans imposer, de faire alliance sans nier les tensions. Elle permet de retrouver des ressorts d’action, non en s’accrochant aux anciens conforts, mais en retrouvant du sens — et peut-être une forme de réconfort — y compris dans et par l’engagement collectif. 

5. La coopération interterritoriale : une nécessité pour les territoires et une raison d’être des agences à affirmer avec les nouveaux exécutifs

Les transitions demandent du temps. Mais elles se déploient dans un contexte politique rythmé par des cycles courts. Les élections municipales de 2026 constitueront un moment charnière. D’ici là, beaucoup de dynamiques risquent de ralentir, de se figer, de se replier sur l’existant. Ce n’est pas une anomalie. C’est une caractéristique structurelle des rythmes démocratiques. 

C’est pourquoi l’agence prend dès aujourd’hui rendez-vous avec l’après. Elle engage, avec ses adhérents, une réflexion sur sa propre gouvernance, qui viendra conclure le projet stratégique en cours. Cette réflexion ne vise pas simplement à redéfinir les équilibres internes, à les simplifier pour favoriser le fonctionnement de ces instances, définies il y a plus d’un quart de siècle maintenant. Elle doit contribuer à structurer à court terme une nouvelle dynamique partenariale centrée sur l’adaptation territoriale, à la hauteur des enjeux qui s’imposent à nous. 

La future gouvernance devra renforcer la capacité de l’Agence à coopérer, à relier, à porter dans la durée des démarches ouvertes, transversales, structurantes — donc à agir avec ses adhérents et partenaires. Ce processus doit permettre, dès l’installation des nouveaux exécutifs, de relancer un projet ambitieux, adapté à la situation du monde, et fidèle à la vocation des agences d’urbanisme en général, à celle de Clermont Massif central en particulier. 

Canicule : pourquoi Clermont-Ferrand est l’une des villes les plus exposées aux îlots de chaleur

Météo-France a placé le Puy-de-Dôme en vigilance jaune canicule, un phénomène amplifié par les îlots de chaleur. Clermont-Ferrand figure parmi les 10 villes les plus sensibles à ce problème. On vous explique pourquoi.

La canicule s’abat sur le Puy-de-Dôme. Météo France a placé le département en vigilance jaune pour la période du 19 au 21 juin. Mais un autre problème sévit dans le département, en particulier à Clermont-Ferrand : les îlots de chaleur urbains. La capitale auvergnate fait partie des dix villes les plus exposées à ce phénomène, selon Météo France. Mais qu’est-ce qu’un îlot de chaleur, et pourquoi cette ville est-elle plus touchée que d’autres ?

Qu’est-ce qu’un îlot de chaleur ?

Les îlots de chaleur urbains se produisent lorsque la chaleur s’accumule dans certaines zones de la ville, notamment pendant la journée, et ne parvient pas à s’évacuer la nuit. Résultat : les températures nocturnes restent exceptionnellement élevées, créant une “couche thermique” au-dessus de la ville. Christel Griffoul, adjointe au directeur de l’agence d’urbanisme Clermont Massif Central, précise : ” Les matériaux durs comme le béton, l’asphalte et le métal absorbent la chaleur du soleil durant la journée et la restituent lentement la nuit, empêchant ainsi un refroidissement naturel. En pleine canicule, cet effet peut atteindre jusqu’à 7°C de plus en ville que dans les zones rurales proches. En 2003, un écart de 8°C a été enregistré entre la commune de Aulnat et Montferrand”.

Pourquoi Clermont-Ferrand est-elle particulièrement vulnérable ?

Clermont-Ferrand a un urbanisme dense et peu de végétalisations. Cela crée des îlots de chaleur. La minéralisation des surfaces urbaines – béton, bitume, métal – empêche le refroidissement naturel de la ville la nuit.” Les secteurs les plus touchés par ce phénomène restent les zones d’activités et certains quartiers de la politique de la ville.

Cette carte d’ambiance thermique, réalisée par l’Agence d’urbanisme Clermont Massif Central, montre les zones les plus susceptibles d’être touchées par les îlots de chaleur, en prenant en compte les ombres portées par les bâtiments, la végétalisation et la présence d’eau.

Carte d’ambiance thermique, réalisée par l’Agence d’urbanisme Clermont Massif Central. • © Agence d’urbanisme Clermont Massif Central

Quelles solutions ?

Plusieurs mesures peuvent aider à réduire la chaleur en ville. Végétaliser les espaces urbains est essentiel. ” Plus de parcs, de jardins et de murs végétalisés peuvent rafraîchir l’air “, explique Christel Griffoul. Les zones aquatiques, comme les fontaines ou les bassins, jouent également un rôle crucial.

Changer les matériaux urbains est aussi une priorité. “Utiliser des revêtements réfléchissants ou naturels permet de limiter la chaleur”, souligne l’urbaniste. Réduire la circulation automobile aide à limiter les îlots de chaleur. “Moins de voitures égalent moins de chaleur. Encourager les transports en commun, le vélo et la mobilité douce réduit aussi l’impact“.

Enfin, des gestes simples permettent de s’en protéger : se rafraîchir régulièrement, éviter les sorties en plein soleil et se reposer dans des lieux frais. La mairie a lancé une carte interactive renseignant les îlots de fraîcheur de la ville. Elle permet aux habitants de localiser facilement des zones de rafraîchissement : parcs, fontaines, etc.

Transformer les territoires, accompagner les transitions : le programme de travail partenarial 2025-2026 de l’AUCM

L’esprit du programme partenarial 2025-2026

Face aux transformations continues, profondes et collectives qui s’intensifient aux échelles globales comme locales, l’Agence d’Urbanisme Clermont Massif central (AUCM) affirme, à travers son programme partenarial prévisionnel 2025-2026, son rôle d’acteur pivot dans l’accompagnement des mutations territoriales.

Insistons sur la méthode d’élaboration de ce programme annuel dont on sait qu’elle constitue un processus structurant de l’Agence. Comme il se doit, celui-ci repose sur une co-construction active avec ses adhérents, qu’il s’agisse de partenaires de longue date ou de récents entrants, tels que la Communauté de communes du Bocage Bourbonnais, le CROUS, l’Université Clermont Auvergne ou encore le Commissariat du Massif central. Ce sont ces échanges réguliers qui permettent d’actualiser les priorités d’intervention autour de sept axes, représentatifs de la diversité des expertises de l’Agence. L’ambition est claire : mieux outiller les élus de terrain pour accompagner les changements de pratiques et d’usages, fédérer les savoirs et les acteurs, favoriser les synergies interterritoriales, et diffuser une culture partagée de l’attention portée aux espaces de vie.

Si le programme 2025-2026 s’inscrit dans la continuité du projet d’agence et des travaux menés en 2024-2025, il approfondit cependant deux champs d’expertise et d’activité : l’adaptation au changement global prend une dimension transversale. Devant la complexité du sujet, l’Agence expérimente avec les territoires pour donner un sens concret à cette pratique et identifier les leviers d’action. Elle déploie, pour cela, des outils pédagogiques, des démarches d’urbanisme favorable à la santé, et une prise en compte accrue du vivant. A côté de l’adaptation, le champ de l’habitat s’élargit en accueillant un observatoire du logement étudiant et en travaillant son volet foncier malgré l’incertitude normative qui règne autour de la sobriété. L’Agence développe aussi une approche plus sensible de « l’habiter », en intégrant les dimensions culturelles et symboliques des espaces de vie.

Un programme partenarial structuré par 7 orientations

Le programme partenarial 2025-2026 est structuré par 7 orientations auxquelles chaque ligne d’étude répond.

Axe 1 : Construire des projets territoriaux et urbains adaptés aux nouvelles vulnérabilités

L’AUCM poursuit son accompagnement des collectivités dans la planification territoriale, en intégrant de plus en plus fortement les enjeux d’adaptation au changement climatique. Elle mobilise ses compétences sur les SCoT, les PLUi ou les projets de territoire, tout en intervenant sur des démarches dédiées aux transitions, telles que le Plan stratégique d’adaptation du Massif central ou le Schéma de transition écologique et énergétique (STEE) de la Métropole.

Axe 2 : Améliorer la qualité du logement et des espaces de vie quotidienne

L’analyse des conditions de vie et d’habitat constitue une priorité forte des membres adhérents de l’Agence. Les actions vont de la revitalisation des centres-bourgs aux politiques communautaires de l’habitat (PLH, CIL), en passant par l’analyse des passoires thermiques ou les dynamiques du logement des étudiants. L’AUCM joue également un rôle d’animation à l’échelle départementale et régionale à travers des clubs et réseaux spécialisés.

Axe 3 : Œuvrer à la sobriété foncière et à la régénération de milieux

L’Agence explore de nouvelles trajectoires de sobriété foncière pour valoriser les espaces déjà urbanisés, à travers l’observation et la réplicabilité d’expériences innovantes, comme le projet BAMBA. Elle intervient aussi sur la renaturation des friches et l’observation de la qualité de vie en milieu urbain, contribuant à une approche durable et pragmatique de l’aménagement. A noter, en 2025, l’engagement fort de l’AUCM auprès du réseau URBA 4 pour accompagner l’Etat dans une enquête prospective sur la sobriété foncière post 2030.

Axe 4 : Soutenir les populations et les espaces les plus fragiles

L’observation des transitions solidaires, l’évaluation des contrats de ville, l’analyse des politiques de petite enfance ou encore l’égalité femmes-hommes sont au cœur de cet axe. L’AUCM mobilise des outils pour analyser les besoins locaux, accompagne les territoires et travaille en lien étroit avec l’ARS pour intégrer les déterminants de santé dans les politiques d’aménagement.

Axe 5 : Favoriser l’accès à des mobilités décarbonées

Les mobilités sont abordées sous l’angle de l’émergence des nouvelles offres à déployer pour redynamiser les territoires. L’Agence poursuit ses travaux sur l’enquête EMC², élabore une réflexion prospective pour la Métropole et soutient des projets structurants comme le Service Express Régional Métropolitain (SERM), avec la réalisation d’une monographie détaillée sur les 30 gares concernées par le projet de SERM du Pôle métropolitain Clermont Vichy Auvergne.

Axe 6 : Contribuer à l’émergence de modèles de développement économique résilients

Dans un contexte de fortes dépendances et vulnérabilités des modèles socio-économiques, l’AUCM fournit des éléments d’analyse et d’aide à la décision sur les mutations de l’emploi, du commerce, du tourisme et de l’industrie. Elle soutient également l’optimisation du foncier économique et développe enfin son expertise sur l’adaptation des modèles touristiques au changement climatique sur la rivière Allier et les trois territoires de lac de Thiers Dore et Montagne.

Axe 7 : Forger une nouvelle culture commune de l’habiter

Cette orientation met l’accent sur l’acculturation des acteurs et la valorisation des démarches exploratoires au service de l’adaptation. Qu’il s’agisse de contributions aux débats publics (Recré-Action, réseau transitions du Massif central), des travaux de recherches prospectives ou inspirantes (GIEC, POPSU, expérimentation prospective), ou de l’animation de programmes dédiés (pastoralisme, projet culturel métropolitain), l’AUCM y renforce son rôle de catalyseur d’idées et de pratiques innovantes.